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DISPARITIONS ? Le 10 avril 1985, Hans Wyr, alors président du Gouvernement valaisan, réglemente le ramassage des escargots. Pas plus de 10 kilos par jour. Une quinzaine d’années plus tard – le 14 mars 2000 – Christian Mayor (député suppléant PRD ) se demande s’il n’y aurait pas péril en la demeure !!!

Après quelques jours ardus passés à traiter des thèmes assez prise de tête, un frais vent de délire souffle sur le Grand Conseil. Les quatre murs de cette noble institution auront tout entendu… sauf ça.

Le 14 mars 2000, Christian Mayor, député suppléant PRD, s’inquiète du sort des escargots en Valais. Protégé en Suisse depuis 1979, la loi autorise chaque individu à en ramasser dix kilos par jour (Arrêté 1985). Cela ne mettrait-il pas en danger la survie de l’espèce ? L’escargot n’est-il pas l’emblème de la façon dont travaillent certains politiciens ? La motion – transformée en postulat – et la réponse sont laissées dans leur intégralité. Des fois – tu comprendras très vite pourquoi – il n’y a rien besoin de rajouter.

  1. POSTULAT

du groupe d’ouverture, par les députés Thierry Fort, Albert Arlettaz, Jean-Henri Dumont (suppl.), Christian Mayor (suppl.) et Yves Ecoeur, concernant l’actualisation de l’arrêté concernant le « ramassage des escargots » du 10 avril 1985 (09.11.1999), (5.097), (motion transformée en postulat).

TEXTE DÉPOSE : cf. Annexes p. 351

DÉVELOPPEMENT :

  1. le député (suppl.) Christian Mayor :

Adversaires politiques, force du progrès, je serai long !

À l’analyse du groupe « ouverture », il s’avère que trop de dispositions légales cantonales sont anachroniques ; nous en avons ici un exemple patent ! Dans l’esprit de réforme qui nous caractérise inlassablement, nous attendons de la part de l’Exécutif et du Législatif un dépoussiérage drastique et systématique de notre législation. Si aucune proposition allant dans ce sens ne devait nous être soumise à l’avenir…, nous nous y emploierions nous-mêmes et nous avons encore quelques textes en hibernation !

Avant que le Conseil d’État ne se voie supprimer la traditionnelle agape « escargots » offerte par la Congrégation des capucins du couvent de Sion, par faute de matière première – escargots s’entend ! – avant que Philippe Roch de la Berne fédérale ne se trouve des talents héliciculticoles en nous imposant la façon de chasser l’escargot sur territoire valaisan, estimés collègues, prenons l’escargot par les cornes ! Il mérite notre soutien et notre attention.

En certaines circonstances, n’est-il pas l’image emblématique de notre façon de travailler, tant en vitesse qu’en spirale pataphysique ?

Nous pensons tout particulièrement aux réformes globales du Parlement et de notre Constitution, actuellement quasi et à moitié operculées.

Estimés collègues, selon la législation en vigueur, toute personne peut chasser n’importe quel escargot, à coup de 10 kg par jour. Dès lors, ne serions-nous pas nous-mêmes en danger ?

Il est temps, en période électorale, de devenir plus sélectif ! Je vous propose donc, Monsieur le conseiller d’État, et à vous, parlementaires, de calibrer dorénavant les sujets contemporains qui doivent nous occuper…

Et, pour ce faire, je me fais un plaisir d’offrir à M. le chef du département le calibre pour mesurer les escargots vaudois que j’ai été chercher à la préfecture d’Aigle ce matin !

 

  1. Le conseiller d’État Jean-Jacques Rey-Bellet, chef du Département des transports, de l’équipement et de l’environnement et président du Gouvernement :

Vous aurez remarqué que j’ai été très lent à me lever…, c’est parce que le sujet mérite une profonde réflexion ! J’ai hésité à répondre au député (suppl.) Christian Mayor « tu les cornes », selon une formule bien bas-valaisanne !

Toutefois, comme le Parlement est, par définition, sérieux, j’y apporterai une réponse sérieuse.

Le Conseil d’État ne pouvait pas refuser ce postulat puisque ce dernier demande soit le maintien des dispositions, avec adaptations, soit leur suppression. Donc, nous acceptons le postulat !

Maintenant, en ce qui concerne plus précisément la question qui est soulevée, à savoir celle d’une étude sur la nécessité de maintenir ou pas ces dispositions cantonales qui datent de 1985, nous avons bien l’intention de maintenir ces dispositions parce qu’elles n’ont rien de tracassier. Ces dispositions prévoient que l’on peut ramasser jusqu’à 10 kg d’escargots par jour avant de se faire contrôler sac et gibecière !

Il n’y a pas, à première vue, de risque d’extinction de la race hélix pomatia, c’est-à-dire l’escargot de Bourgogne.

Par contre, cette bestiole figure dans l’inventaire des objets… ou plutôt des bêtes protégées. Actuellement, les dispositions qu’avait prises le Conseil d’État très sagement en 1985 peuvent être maintenues, avec quelques adaptations parce que la nouvelle loi sur la protection de la nature, du paysage et des sites prévoit que l’application des mesures de protection ne dépend plus du Service de la chasse et de la pêche – ce qui est logique puisque nous n’attrapons pas les escargots au fusil, ni ne les péchons ! -, cela dépend donc dorénavant de mon département et du Service des forêts et du paysage. Alors, nous allons adapter cet arrêté du Conseil d’État en maintenant grosso modo les dispositions qui y figurent.

Puisqu’il s’agit d’un objet très important, je me promets d’adresser aux postulants – comme en religion en quelque sorte – le texte complet du développement que j’avais préparé.

Je m’en tiens donc là, en vous précisant qu’un kilo d’escargots coûte 44 fr. 50 pour 100 pièces, ce qui, sachant qu’une intervention parlementaire sur le plan fédéral a été évaluée à 4 080 francs pour l’Administration fédérale, on peut en déduire, Messieurs les députés source de progrès, que vous avez coûté l’équivalent de 9 000 pièces d’escargots à l’Administration cantonale !

La présidente :

Merci, Monsieur le président du Gouvernement. On est bien content de savoir que ce n’est pas au Service des transports que s’adressait ce postulat !…

Texte retrouvé par Joël Cerutti dans les archives du Grand Conseil valaisan

PS : En novembre 2016, l’escargot revenait au Grand Conseil. Le texte du Rhône FM, signé par Fabrice Germanier.

« Le ramassage des escargots (arrêté du 10 avril 1985) ne sera sans doute plus de la compétence de la police cantonale valaisanne.
C’est l’une des conséquences de la révision de loi sur laquelle le Grand Conseil se penchera cette semaine en 2e lecture.
Cet anachronisme ainsi que quelques autres devraient être définitivement gommés. Au soulagement du commandant Christian Varone qui se réjouit de pouvoir s’appuyer dès l’an prochain sur une loi « moderne ».
La police cantonale pourra donc agir « en amont », anticiper grâce à l’introduction de mesures de surveillances secrètes, d’agents infiltrés ou de moyens techniques comme la vidéosurveillance de lieux publics, cela avant l’ouverture d’une procédure pénale. L’utilisation de drones, par exemple lors de la venue de supporters adverses lors de matches du FC Sion, est également prévue.
En contrepartie, les droits des particuliers seront renforcés.
Le vote final sur ce texte, approuvé sans opposition lors de la 1ère lecture en juin, aura lieu vendredi. »

PPS : En Valais, de par le passé, l’escargot était considéré comme un remède contre la gueule de bois. Dans l’ouvrage « La Suisse inconnue, Valais » (édité par le Touring Club Suisse et Shell Switzerland à la fin des années 50), l’auteur André Beerli rapporte ceci. « Enfin, si vous avez abusé de l’excellent Fendant de Savièse, avalez donc quelques escargots vivants ! »