Emmanuelle Breiner te catapulte dans d’autres mondes par ses Escape Life. Des missions à large échelle qui te montrent le Valais sous un jour fantasmagorique et historique. Quant à la vie même d’Emmanuelle, elle offre des facettes fascinantes.
La première fois que j’ai croisé Emmanuelle, en 2017, elle réussissait déjà un rare exploit. Celui de faire courir Valais Wallis Promotion dans les ruelles de Sion. Défiés par « Mission Da Vinci Code à Sion », les collaborateurs se battaient pour libérer de vieilles âmes et sauver la leur. Quel doux plaisir d’observer cette énergie déployée et ces neurones creusés !
Depuis, ça galope-galope dans l’existence d’Emmanuelle.
À Haute-Nendaz, elle t’envoie dans les pas du Déserteur, ce peintre-guérisseur, pour y débusquer la Balance de la Pesée des Âmes, encore un truc pour damer le pion au Diable. Sur Fully, elle te promet un Élixir de Vie si tu ne te paumes pas dans les pièges réservés par une Usine d’Emboutissage fantôme. Sur les berges de Monthey, tu admireras des Naïades mythologiques et un Vitrail Divin.
Cette façon de réinventer le tourisme par des énigmes, des aventures, des démons, de l’alchimie, de la magie, des dimensions autres porte un label : Escape Life. À ce jour, le compteur se fixe sur six énigmes à large échelle. Et il tourne vite dans la tête de leur conceptrice.
Une Curieuse de patrimoine
Sur la forme Emmanuelle t’invente une nouvelle vie. « Les personnes passent deux heures de leur temps à entrer dans quelque chose d’autre. J’espère que lorsqu’elles reviennent dans la réalité, ce n’est pas trop dur pour elles ! », commente la principale intéressée.
Ses Escape Life, imaginés en collaboration avec des villes te propulsent dans une dimension parfois oubliée.
Celle du patrimoine valaisan. Celle de ton enfance, ce moment où ton imaginaire turbine sans être bridé par la conformité. Celle où tu étais à l’affût d’émerveillements. Emmanuelle l’avoue. « Oui, je suis une curieuse, la pire des curieuses. Cela me complexifie la vie et me la met en danger ». Escape Life lui permet d’être une exploratrice. « Chaque jeu me fait grandir, il me pousse à innover, à déployer des ailes dans mon monde et d’exister un peu plus… »
Avant l’envol, la gestation d’un scénario d’Escape Life met du temps à venir au monde. Emmanuelle en parle avec un tel débit passionné que mes notes sont à la traîne. « Cela doit devenir des évidences qui finissent par me rassurer. Au radar, j’explore, je sens les choses, j’examine tous les recoins, je cherche la lumière dans les failles, les erreurs. C’est un immense casse-tête intellectuel. Je prends une option, je vois sa logique, quelles contraintes elles me posent, quels sont les risques. Je tiens compte des variables dans la logique. Je dois minimiser les risques d’erreurs, invalider les variables, arriver à ce que ce soit fluide. »
En bref, ce n’est pas simple de l’être…
Emmanuelle bénéficie aussi de l’enthousiasme de ses interlocuteurs. Certains deviennent des « facilitateurs ». « Je connais le métier que je me suis créé. Il m’apporte beaucoup de joie, il m’ouvre des portes, on me donne des clés. Je rencontre des personnes qui adorent partager leurs savoirs, ce qui m’évite parfois des mois passés à la Médiathèque. J’ai rencontré des archivistes tellement fraternels, tellement humain. Je m’entoure d’humanistes… et c’est que je suis… »
Une Curieuse de vie
Emmanuelle se balade comme une funambule sur le fil de son existence. Elle cherche des équilibres entre elle et notre société. « Je suis façonnée par l’altérité ».
Elle a de qui et de quoi tenir au niveau familial.
Dans ses très jeunes années, elle se souvient de son père qui travaillait au cœur des renseignements militaires. « Encore en pleine Guerre Froide, nous étions proches de la frontière tchèque. Il écoutait les communications du bloc soviétique et survolait la Russie. J’avais dans les 5 ans, j’en ai gardé des images claires, idéalisées. C’était une période douce, tendre, bucolique, chaleureuse… »
Sa famille quitte l’Est pour la France puis son parcours d’étudiante, de stagiaire et de pro la mènent dans les bureaux ou sur le terrain pour l’ONG Carad (Australie), l’Unesco (Genève), Good Planet (Paris), Green Cross (Paris)… Puis Emmanuelle adopte le Valais (Sponsoring pour le FC Sion, adjointe scientifique à la HES-SO).
« Je dois avoir eu des vies antérieures par ici. Je m’y sens bien comme si j’appartenais à cette terre. »
Une Curieuse de sorcière
Lors de notre première interview, (2017, cf début d’article…), Emmanuelle commençait à trouver ses bases. « Depuis quatre ans, j’allais d’échecs en blessures. Mais je les remercie ! Elles m’ont permis de rester droite, d’apprendre à me tenir droite comme un arbre dans la tourmente car j’ai acquis des racines… » De ces bourrasques ont émergé l’idée des Escape Life et des quêtes plus personnelles. Sortir du mental, écouter son corps ? Elle se met au tir à l’arc instinctif. Elle s’y initie, quelques mois plus tard, présente un spectacle à dos de cheval ! « Il y a deux ans, tout était déjà là mais je ne les exprimais pas. Cela s’est façonné dans la temporalité par ma féminité. »
Investie dans sa passion, Emmanuelle apprend aussi à respecter sa propre énergie.
« Je passe mon temps à donner, je me dois de veiller à un certain équilibre. »
Emmanuelle ne cache pas cultiver alors son « côté sorcière à 200 % ». « Cela m’a énormément apporté. J’y développe mon intuition… » Chaque mois, durant 4 ou 5 jours, elle s’isole pour dynamiser cette période de son cycle de femme. « J’ai organisé mon temps en fonction. J’y réalise des travaux créatifs dans la peinture et surtout l’écriture. En sortent des idées magnifiques et salvatrices dont je me sers plus tard. J’y prépare des projets, réfléchi à des décisions en pleine conscience. De cette solitude naissent des choses authentiques. »
Quand on invente des vies, rien n’empêche de se créer la sienne selon ses propres élixirs, non ?
Joël Cerutti
Photos: David Boraley
Pour le site d’Escape Life, tu cliques sur les deux mots…
Excellent article et une excellente personne! Beaux projets