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Il inaugure, Frédéric Recrosio. Cette rubrique du site demande à des personnalités du cru leurs endroits (d) étonnants en Valais, les lieux où elles se ressourcent. Avec l’auteur de « Ma Revue à Nous », inutile de t’attendre à du conventionnel ou de l’aseptisé. Prévenu(e) ?

 

Il m’aménage une bonne tranche d’heure à la Foire du Valais, Frédéric Recrosio. Dans un environnement noir de populo, on relève même un défi. Celui de trouver un lieu où l’on arrive à s’entendre dans le brouhaha. Pas loin de sa « Boîte à Questions », endroit prévu pour buzzer et te lâcher face caméras, on descend une mousse et je note, je note, docteur. Les lieux où le meneur de « Ma Revue à Nous » se ressource en Valais risquent (peut-être) de te surprendre. C’est prévu un peu pour… et aussi de donner des bonnes adresses. C’est prévu un peu pour (bis). Allez, bonne balade !

Evolène (de si extraordinaires viandes)

« J’aime être coupé de la plaine, qu’on ne la voit plus, que je me préserve de la vilenie des villes grises. À Evolène, je dors à l’Hôtel Hermitage parce que j’ai une fascination pour les grands vieux hôtels qui craquent de partout, de ces chambres où il n’y a pas toutes les commodités des établissements modernes. J’apprécie l’Hermitage parce qu’il est tenu par la famille Gaspoz, et Olivier est un copain d’école. Il y a aussi une salle, bien maintenue. On pousse les meubles et je peux y travailler. Je me réveille, je déjeune, j’écris et je vais répéter dans la salle. »

« Devant l’Hermitage, il y a des voitures électriques à disposition. Je peux me rendre aux Haudères, au Petit Café de Nicole Pahud qui est la merveille des merveilles (et je ne dis pas ça parce que c’est ma cousine). »

« À Evolène, je vais y écrire par choix et aussi parce que, lorsque tu sors, tu peux bien manger partout. Il y a trois, quatre adresses avec de la viande extraordinaire. Au Refuge, tu as par exemple des rognons à l’ail. Il y a l’accueil de Chez Raymonde, chaleureux, familier, provocant : elle te serre dans ses bras. J’y suis allé avec Yann Marguet, il était fasciné ! »

Vieille ville de Sion (le Disneyland de la Convivialité)

« Oui, la Vieille ville de Sion, c’est un peu mon doudou géographique. Enfant, j’ai habité à Platta puis à la Place du Midi, j’ai plutôt bien fréquenté le Grand Pont… Pour moi, la Vieille ville de Sion, c’est le Disneyland de la Convivialité (ce n’est pas péjoratif !) : il y a tout ! Avec les copains, quand on entamait le Grand Chelem – à savoir de s’arrêter dans chaque bar de la Rue de Conthey puis ceux du Grand Pont – on n’arrivait jamais en haut ! À La Pinte, on demandait au patron de nous servir le pire shot. Il devait inventer le plus mauvais mélange d’alcools et il était obligé de le boire avec nous. Si par hasard il était bon, on ne payait pas. »

« Là encore, pour manger, dans la Vieille ville… Tu as Schuppli au Salon de l’Entrecôte comme au Vieux Valais, la Brasserie du Grand Pont, la Croix Fédérale, Le Café des Châteaux… C’est juste merveilleux ! Le vendredi, le marché te met hors du temps. Ceux qui viennent de l’extérieur pensent que les Valaisans ne travaillent pas le vendredi, qu’ils sont sur « off ». Tu as réussi quelque chose dans ta vie quand tu ne bosses pas le vendredi. »

Le Théâtre de Valère (des coulisses pleines de rêves artistiques)

« En 1997, on y était venu au Théâtre de Valère avec Fred Mudry quand on formait encore les Los Dos. Dans les coulisses, tu ressens quelque chose, elles sont chargées des rêves artistiques, il y a une odeur, il y a le bois, l’artisanat. Et ça craque toujours, la scène est au-dessus de toi. Avec « Ma Revue à Nous », pour le futur, j’aimerais y associer tout le quartier, il y a quelque chose à creuser. Je réfléchis à comment relier la rue entière. À la Biennale de Venise, l’artiste valaisan Valentin Carron avait imaginé un long serpent en métal que le visiteur suivait, ou alors comme la ligne rouge, au sol, à Sierre qui conduit depuis la gare vers le funiculaire… »

Binn (comment se préserver des zombies)

« Binn, c’est comme Key West en Floride: ne s’y trouvent que les gens qui veulent y être. Après, lorsque tu es à là-haut, au restaurant Albrun, tu manges à 15 dans le Gault & Millau. À Binn, il y aurait la fin du monde, tu n’aurais qu’à boucher les tunnels. Les zombies ne pourraient pas monter et tu tiendrais 30 ans facile ! Binn, c’est typique de l’endroit où tu vas en courses d’école, où tu es obligé de marcher, sauf que maintenant, tu le fais avec plus de plaisir. »

« Dans le Haut-Valais, j’ai emprunté des trains où tu pars dans les profondeurs du canton. Tu as l’impression que cela ne s’arrêtera jamais. Je ne parle pas le Wallisertitsch, ni le bon allemand, je parle le mauvais allemand. Mais le gars, en face de toi, il entend tes efforts, il est touché et il devient sympa. »

Le Rothis Western City (d’autres extraordinaires viandes)

« Avec des copains, on a fait la route du blues, aux États-Unis. Avec les mêmes, on va au Rothis Western à Steg, c’est mi-cow-boy, mi-haut-valaisan. Il y a des gens qui dansent en ligne, il y a quatre cheminées où ils te cuisent plein de viandes différentes et de ces côtes de bœuf. Un peu plus loin, tu visites Gampel. Il y a endroit, sous un bar, au plafond bas, où tu peux fumer, alors que c’est interdit. Tu te sens un peu comme aux temps de la Prohibition. »

Hôtel Crans-Sapins (tu entends tout, il se passe quelque chose)

« Sur la façade de l’Hôtel Crans-Sapins, il y a un néon qui date de cinquante ans, la dame qui le tient doit en avoir 85. À chaque fois que je monte – en janvier pour l’anniversaire d’un pote – je me demande si elle sera toujours là. Le lieu n’a pas bougé depuis 70 ans, tout est peaufiné en l’état. Chaque chaise, chaque table est de collection et dans l’état. Tu dors dans un drôle de lit, tu entends tout l’étage mais il se passe quelque chose ! »

Propos recueillis par Joël Cerutti

Ah oui, fin d’année, tu n’oublies pas : http://www.marevueanous.ch/

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