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Quatre artistes contemporains souhaitent ouvrir des ateliers créatifs dans les EMS. Présentation avec Katia Forchetti et Sève Favre de « SharExpo » qui attendent que s’ouvrent des portes.

Motivées ? Pas qu’un peu ! En cette matinée estivale, devant un café du Salon de Thé Clémentine à Sion, le duo Katia et Sève (par ordre d’arrivée) se montre volubile, impliqué, bourré d’énergies.

Nul doute, lorsqu’elles détaillent le projet « SharExpo », Katia (Forchetti) et Sève (Favre) ont l’enthousiasme communicatif. « Même s’il n’y a qu’une seule personne, ON LE FAIT ! », milite Katia. « Nous apportons une bulle d’air, de l’évasion, de l’énergie, il s’agit de VIVRE, de créer sur un mode participatif ! », renforce Sève. « Nous, on aime les créations communes où chacun met son grain de sel », glisse encore Katia, épicant la conversation de sa ferme conviction.

Le projet « SharExpo» affiche d’emblée sa couleur dans son dossier officiel, celui envoyé aux autorités, aux EMS, aux instances qui financent. Il indique dès son premier paragraphe qu’il veut « répondre à l’isolement social du troisième âge en institutions, nous proposons la mise en place d’ateliers participatifs proposant des interactions multidirectionnelles et auto-enrichissantes entre un public « de seniors » et des artistes de notre temps. »

Casser les murs

Créer, cela réunit, cela casse les murs sociaux entre les générations.

« Il ne faut pas oublier que la personne âgée est un citoyen comme les autres qui peut s’exprimer comme tout un chacun ! Dans le but d’une appartenance, d’une inclusion sociale et d’une participation cognitive, politique et civique, il est tout autant important de favoriser leur accès à la culture contemporaine », reprend la plume commune de Katia, Sève (initiatrices du projet) à laquelle s’ajoutent Rebecca Michelet et Valentin Merle.

Ce quatuor souhaite ouvrir des ateliers divers et variés aux personnes séduites par leurs idées. Le nombre des participant.e.s se situe entre deux et quatre. « J’ajoute que je suis vaccinée », souligne Sève. Trève de balivernes ou d’alternoiements, que propose «SharExpo» aux Seniors ?

Katia se lance dans des « Palimpsestes corporels » où l’on photographie « la beauté d’un corps marqué par les ans ». Ces clichés sont ensuite édités en format carte postale et présentés sur un tourniquet.

Katia, photo fournie avant qu’elle en réalise d’autres avec les participant.e.s de « SharExpo ».

Sève permet d’interagir sur des œuvres qu’elle a créés sur toile via une interface digitale utilisée par son public. Cela fonctionne aussi bien sur un téléphone, une tablette ou un ordinateur. Cela modifie la création de Sève pour réaliser une variante. Lorsque le résultat convient à son auteur, il est publié sur tous les supports que fournit internet.

Sèvre Favre propose des œuvres modulables via votre ordinateur. Cette photo, par contre, restera telle quelle.

Rebecca Michelet part, elle, fouiller dans les souvenirs sensoriels. Via un questionnaire, elle recueille les impressions autour de souvenirs domestiques en se focalisant sur le ressenti dans « l’action de faire le pain ». Un cahier recueille les mots utilisés, ils seront lus pour traduire les ressentis de groupe ou individuels. Ce « verbalisation challenge » se transforme en performance artistique.

Performance de Rebecca Michelet, photo sans mention piquée sur le site de l’EDHEA.

L’atelier « Cyanotype Botanique », mené par Valentin Merle, se passe en deux temps.  D’abord, il y a la collecte dans la nature de « plantes, branches ou cailloux » proche des EMS. Ces matériaux servent ensuite à des compositions sur un papier enduit. Ce qui permet de réaliser un cyanotype, un procédé photographique ancien. Une fois développée et séchée, chaque réalisation participe à une œuvre commune, composant « un grand quadrillage ».

Valentin Merle devant quelques représentants du monde végétal.

Avec le cœur et sans intérêt

Katia ne cache pas que cette idée lui trotte dans la tête depuis un bail. « Je me rappelle d’un film mexicain. Il racontait l’histoire d’une caissière de supermarché qui allait chez des personnes âgées pour leur faire la lecture. J’ai longtemps gardé ces images en tête. Elles sont revenues lorsqu’en 2020 j’ai dû choisir un projet pour mon DAS (Diploma of Advanced Studies). Dans mon village natal, en Italie, les aînés restent intégrés dans le quotidien, il se sentent en vie, utiles. Ici, il y a une cassure qui se crée avec les EMS… » « L’isolement, encore renforcé par le Covid 19, n’a rien arrangé, observe Sève. N’oublions pas que nos aînés vivent tant que leurs cœurs battent ! » Katia rebondit sur le mot : « Oui, nous le faisons avec le cœur et pas par intérêt… »

« SharExpo » a reçu les aides artistiques et le concept entre dans les budgets créatifs des EMS. Il reste à convaincre ses responsables en ces temps de perpétuelles incertitudes.

Quartier Culturel, son panneau, sa verdure, sa boîte à livres et sa légende descriptive.

« Nous avons envoyé nos dossiers, relancé par des téléphones, nous avons de bons contacts… sans arriver à entrer. Ils laissent le temps au temps pour voir comment cela évolue… Nous aimerions commencer, nous, durant l’automne 2021. Et il y aurait ensuite une exposition en février ou mars 2022 », espère Sève. « Quoiqu’il advienne, en septembre, j’ouvrirai un atelier au Quartier culturel de Monthey. Cela s’adresse aussi aux personnes qui sont en unité de jour et qui peuvent venir par leurs propres moyens », lance Katia.

Des obstinées avec de bonnes raisons pour l’être, non ?

Joël Cerutti

http://www.sharexpo.art/contact

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