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Photo ©Malika Pellicoli

Avec le livre « Croqu’Valais, rencontres gourmandes », France Massy incite les élèves des Cycles valaisans (et toi aussi!) aux plaisirs du bien manger. Recettes, portraits, infos encouragent à consommer local. Un ouvrage qui dénote d’une certaine cohérence de parcours : France Massy a ouvert quelques voies dans le domaine culinaire.

 

J’ai été initié à la cuisine tardivement. Parce que ma maman Vérène s’était cassé le poignet et que, fils unique, j’ai été désigné volontaire pour apprêter le repas de midi. Cela valait ce que c’était: je n’avais pas sous les yeux « Croqu’Valais, rencontres gourmandes » de France Massy. Au Cycle d’orientation, je suivais des travaux manuels qui m’apprenaient à réaliser des trucs moches (immonde vase à fleur, brochettes métalliques plus ou moins torsadées) que je refilais à ma grand-mère ravie. Pas un seul instant, je n’ai reçu des rudiments autour des petits plats dans les grands. Parce que « Croqu’Valais, rencontres gourmandes » – signé par France Massy (réalisation et rédaction), Anouk Andenmatten (graphisme), Christel Voeffray (illustrations), Sedrik Nemeth et Christine Carron (photos) – n’était pas encore distribué aux élèves de première année du Cycle.

Dès décembre 2020, la lacune est réparée.

Dans un premier tirage à 9 000 exemplaires, « Croqu’Valais » apportera la bonne parole des belles assiettes à nos ados. « J’avais d’abord dans la tête de réaliser un livre de cuisine pour les 5-10 ans parce qu’il faut les choper assez tôt, les jeunes ! », commente avec humour France Massy. Puis la journaliste en parle au Conseiller d’État Christophe Darbellay qui s’enthousiasme et implique son Département (économie et formation). Il estime que l’ouvrage devrait être disponible dans les écoles. Balle passée dans le camp de Jean-Philippe Lonfat (chef du Service de l’enseignement) qui trouve que cela doit se faufiler dans le programme du Cycle. Un dribble de réflexions avec le Service de l’agriculture et celui de l’économie, du tourisme et de l’innovation… et c’est: Goooaalllll ! « J’ai revu mon concept pour les 12-15 ans, j’ai étoffé la matière… »

Développement durable au menu

L’opus se décline autour des quatre saisons d’une année (tant qu’il y en a encore quatre, mon pauv’monsieur), il donne la parole à quatre chefs, il fournit douze recettes, il présente douze producteurs cantonaux. « Le département concerné comme moi-même avions dans le viseur tout ce qui concernait le développement durable », souligne France Massy. Joyeuse nouvelle pour un heureux Noël, « Croqu’Valais » ne prendra pas la poussière dans les pupitres, les élèves pourront le garder à la maison. Des fois que ce virus (sympa, celui-là !) se transmettrait à leurs parents. Nuance dans le détail, l’État n’a pas acheté « Croqu’Valais », il a pris en charge les frais de production.

Au niveau du vécu « Jolis livres de cuisine », France Massy n’en est pas à son coup d’essai. En 2001, elle en signe un premier avec le chef Roland Pierroz. « Il travaillait à fond depuis le matin. Dès 15 heures, nous dégustions tout ce qu’il avait cuisiné. Je lui courais après comme une petite souris pour voir comment il s’y prenait. » Quelques années plus tard (2009), elle récidive avec Didier de Courten.

« Ses recettes étaient dessinées à l’avance et assez sophistiquées. Il était précis au millimètre. C’était pour moi un autre exercice. » Avant de manier la plume et de tapoter sur le clavier, France Massy interprétait ses partitions sur son piano, devant ses propres casseroles. « Dans une autre vie, j’ai tenu des restaurants et j’ai été aux fourneaux », se présente-t-elle dès le début de notre interview. Au départ, il n’était pas question qu’elle s’y attelle. Et puis un jour de Pâques 1988… «… le chef n’est pas venu travailler. Alors je m’y suis mise… Il faut dire que j’avais le profil, j’étais enceinte, j’avais les rondeurs de l’emploi. Lorsque tu vois un chef triste et maigre, tu as tendance à fuir. Là, les gens sont restés. J’ai accouché et je suis revenue… pour une quinzaine d’années.» France « raccrochera sa toque » (comme l’écrit le Journal de Sierre) en 2001.

Entre-temps, dans un monde hypermasculinisé, la singularité féminine de France lui apporte l’intérêt des médias. Elle s’avoue autodidacte, atteint en 1992, la note 14 au Gault et Millau (lors de ses débuts, De Courten reçoit un 15, juste pour comparer)… À La Poste puis dans sa Nouvelle Rôtisserie, elle tente déjà les paris du fait maison, du Slow Food.

Revue de presse à ma façon qui apprête des souvenirs au goût du jour

Le Confédéré – 18.12.1992

Le Nouvelliste – 27 décembre 1995

Le Nouvelliste – 18.08.1999

Journal de Sierre – 10.11.1998

Journal de Sierre – 22.03.2002

Elle figure dans les journaux puis elle y rédige des chroniques, elle essaie déjà en 2002 de poser les bases d’une école du goût destinée aux enfants. La suite dans les idées, avec elle, tient dans sa cohérence. Ses fourneaux éteints, elle s’essaie à d’autres voies. « Durant un an, j’ai accompagné La Fourchette Verte dans son installation en Valais. Mais je déteste tout ce qui est administratif, ce n’est vraiment pas pour moi. Ensuite, j’ai travaillé pour Charles Bonvin, une superbe maison. J’étais assez bonne pour la représentation et mauvaise pour la vente… » Comme tout conduit au journalisme, elle a entamé sa formation à peine la quarantaine dépassée. La suite se lit plus que régulièrement dans les colonnes du Nouvelliste où France conserve une prédilection pour les sujets gastronomiques et viticoles, on se demande bien pourquoi…

Commande personnalisée à l’emporter

La recette de « Croqu’Valais » se révèle haute en calories informatives. Tu y découvres que l’asperge gagne 15 centimètres en une journée, que la carotte prend sa couleur orange au XVIe siècle, que la fraise a été de justesse importée du Chili… France Massy incite aux gestes qui préservent la Nature à commencer par « Croqu’Valais » en pur papier recyclé. « J’en aurais même aimé un à base de gazon mais cela n’a pas été possible ».

France Massy possède 1 000 exemplaires personnels qu’elle écoule à 28 francs l’unité. Tu dois craquer parce que c’est Noël, que je l’ai déjà écrit, que cela s’appelle appuyer une information plus tellement subliminale. En ces temps d’éloignement humain, la commande passe par les clics numériques : fm.gourmandise@me.com. Si tu es de nature audacieuse, dès le 10 décembre, l’oeuvre sera même en librairies. Mon rôle de passionneur s’arrête là où commence le tien…

Joël Cerutti

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