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La richesse de son parcours de vie a menée Andrée Fauchère dans bien des endroits. Pour Valais Surprenant, elle marque de quelques pierres blanches ceux qui ont compté dans son itinéraire. Evidemment, on parlera de Dent Blanche, de Rhodiola rosea mais aussi d’hélicoptères et d’Haroun Tazieff. Du consistant… et je ne suis resté que deux heures avec elle !

 

Longtemps, je me suis couché de bonne heure et je n’étais pas assez (r)éveillé dans ma connaissance d’Andrée Fauchère. Je l’observais du coin de l’œil, à l’angle de ma rétine ou de mon iris (sans doute le droit). Je la lisais (plus d’une trentaine d’ouvrages à son compteur bibliographique !), j’étais parfois aux mêmes tables qu’elle lors de dédicaces, je la repérais dans les couloirs de l’Hôtel Kurhaus à Arolla (lors d’une ou deux « Rencontre Internationale du Livre de Montagne »). Quelques articles sur elles avaient glissé des marqueurs de souvenirs dans ma mémoire.

Depuis exactement un demi-siècle, Andrée a quitté Neuchâtel et a pris ses quartiers dans le Val d’Hérens. Elle élève seule son premier fils Patrick suite à un accident de voiture qui lui a enlevé son premier mari. C’est une bougillonne, Andrée, dans le sens où il lui est impossible de rester garée en sa zone de confort. Notre herboriste fusionne avec la Nature qu’elle explore de toutes ses forces. Elle escalade, elle skie, elle saute en parachute. Spéléo, elle descend dans les grottes. Responsable un temps de l’Office du Tourisme d’Arolla, elle se remarie avec Jo Fauchère, nourrit le projet d’élever escargots et grenouilles. Idée qui restera à ce stade.. Forte de caractère, elle imprime les sensibilités du moment par quelques premières audaces (t’as qu’à lire plus bas).

Photo Synergie Santé

Au Népal, en 1981, le destin lui dérobe son second époux à 5500 mètres. Eprouvée dans son cœur de femme, de mère et aussi dans l’organe qui porte ce nom, Andrée se ressource dans les mots. Elle parle de ces morts qui ne sont jamais des fins en soi, elle restitue des épopées de sa région ou des aventures aux plus humbles échelles humaines. Et ce samedi soir du 26 octobre 2019, au Salon Synergie Santé du Châble, Andrée m’a percutée lors de sa conférence. Je l’ai vue de face avec une force de conviction bouleversante évoquer encore le décès de son fils Nicolas et les enseignements qu’elle a pu en tirer. C’était du remuant dans les tripes et l’âme. Sa conférence m’a renforcé dans la volonté d’une autre rencontre dont voici le résultat : des photos et ses riches commentaires, le principe de cette rubrique…

 

Sous la protection de la Dent Blanche

Photo Andrée Fauchère

 « Depuis que je possède un téléphone portable, j’ai dû prendre dans les 4000 vues de la Dent Blanche. J’avais déjà une photo de cette montagne dans mon carnet de grimpe. Pour moi, elle a été le symbole d’une nouvelle vie lorsque je suis arrivée en 1969 à Evolène. Il se passe quelque chose de magique avec ce qu’elle dégage. Elle vous prend dans ses bras, vous entoure, vous sécurise. Elle est extraordinaire, la Dent Blanche, dans ses humeurs bonnes ou mauvaises. Elle est lumineuse, elle change tous les jours et son observation ne m’est jamais rébarbative. »

Ferpècle et la rencontre des éléments

Photo Wikipédia

 « Il se dégage de Ferpècle une énergie pure, c’est un lieu de rencontre de tous les éléments. Il y a des gens qui viennent depuis la Finlande ou la Suède pour être dans le puissant vortex qui s’y trouve. Lorsqu’on s’y arrête, qu’on s’y asseoit, on ressent tout ça. J’y ai croisé une dame d’Evolène, en costume, qui y allait pour se soigner parce qu’elle ne se sentait pas bien. »

De Véronique et Antoine au Rhodiola rosea

Photo site Andrée Fauchère

« Il y a dix ans j’ai publié « Cotter 2057 mètres au mayen d’Antoine », une belle histoire qui racontait l’alchimie entre la parisienne Véronique et Antoine de la région. Ils y ont connu vingt ans de bonheur. Aux confins de Cotter, il y a l’alpage de Prélet où je loue une ancienne fromagerie en été, sans eau, sans électricité. C’est aussi là que pousse la Rhodiola rosea, une des plus belles plantes adaptogènes que j’ai découverte au début des années 2000. Je l’appelle « Ma racine d’or » dans un de mes ouvrages. Je la trouve hors du commun par toutes les vertus qu’elle possède. Elle diminue le stress, elle a des vertus anti-oxydantes, elle améliore les capacités mentales, psychiques, physiques. Elle fait partie des cultures nordiques comme celle de Russie. Là-bas, il existe énormément de publications à son sujet. Ici, elle est mal connue. Pour développer des produits tirés de cette plante, j’ai travaillé plusieurs années avec PhytoArk à Conthey. Je suis vraiment tombée en amour de la Rhodiola rosea qui est un miracle. »

Le Refuge (les autorités et les herbes)

Photo site Le Refuge

« J’aime beaucoup aller au restaurant Le Refuge, à Evolène. Véronique Vuignier, qui le tient, est une amie et je me sens beaucoup d’affinités avec elle. Elle a aussi une ouverture totale sur les plantes. Je me souviens d’un repas mémorable où nous avions invité les autorités compétentes du moment avec un menu uniquement à base de plantes. Il y avait un feuilleté à base de raiponse. Donc, je demandais des réponses à des politiciens… »

Le Châble, Synergie Santé dans la simplicité

Photo Synergie Santé

« C’est un plaisir d’aller au Châble et au Salon Synergie Santé organisé par Edith Bruchez. On y rencontre des gens sensibles qui font preuve de beaucoup d’ouverture dans leur existence. C’est important aussi d’oser dire certaines choses dans la simplicité, sans pratiquer un langage d’initiés qui ferme les gens. Je suis touchée par les dialogues pertinents qui s’y nouent, chacun dans la compréhension de l’autre. »

La Maison FXB du Sauvetage, Sion

Photo bm-archi.ch

« Mes deux fils travaillent ou ont travaillé à la Maison du Sauvetage de Bruno Bagnoud, soit comme pilote, soit comme ambulancier. Quand je leur demandais comment s’était passée leur journée à Air-Glaciers, ils me répondaient : « Rien de spécial » car ils étaient tenus à une certaine discrétion. Alors j’ai voulu comprendre ce qui s’y passait et Bruno a fait le lien. J’ai eu le bonheur d’interviewer mes fils pour ce livre « La Maison FXB du Sauvetage » ainsi que tous les autres acteurs. Ce métier ne peut s’exercer que dans un esprit de partage, d’union, la Maison FXB devient la première famille. Elle fait partie de ma vie, de nos vies. »

Cabane de la Tza, première gardienne femme

Photo Thyon.ch

« Lorsque j’ai épousé Jo Fauchère qui était guide, il y avait le projet de construire la Cabane de la Tza, qui se trouve à deux heures de marche d’Arolla. Mon premier mari était entrepreneur sur Neuchâtel et il avait noué des liens avec Gilbert Fachinetti. Il avait un baraquement à disposition, nous l’avons récupéré et c’est Air-Glaciers qui a fait le transport à la Tza. Gilbert a encore donné des casseroles, des lits, des couvertures… Lorsque la cabane a été prête, s’est posée la question de celui qui allait en être le gardien. Je me suis annoncée. Je suis devenue la première femme gardienne de cabane en Suisse, nous étions en 1975… J’y ai passé trois étés, sans eau, sans électricité, sans téléphone. Il a fallu se montrer à la hauteur de la montagne. »

 Riddes et Haroun Tazieff

Photo INA

 « De par ses expéditions à l’étranger et certains projets, Jo s’est retrouvé en contact avec le vulcanologue Haroun Tazieff. Lorsque Jo est décédé, Haroun m’a appelé et m’a demandé de le rejoindre à Paris. Je suis devenue en Suisse, son assistante pour l’organisation de ses conférences, de ses contacts avec la presse. Il travaillait comme un malade, c’était aussi un farfelu. Lorsqu’il est devenu Ministre des risques naturels et technologiques majeurs, il adorait semer ses gardes du corps. A Riddes, au printemps 1985, lorsqu’il y a eu un éboulement dans la région des Crêtaux, Haroun s’est rendu sur place. C’est moi qui ai été le chercher à Genève, dans ma petite Fiat Uno bleu marine. Une fois encore, il a laissé sur place ses gardes du corps et il était ravi. Aux abords de Riddes, le journaliste Pascal Thurre a stoppé ma Uno et il a mis Haroun dans une grosse voiture. Nous avons ensuite été reçu par le chef du gouvernement valaisan. Les autorités ne prenaient pas au sérieux les avertissements d’Haroun sur les risques de tremblements de terre. Il y a eu une partie officielle avec apéro. Durant les discours, Haroun Tazieff avait déjà commencé à taper dans les plats de viande séchée ! J’ai adoré travailler avec ce grand Monsieur ! »

Le Kurhaus d’Arolla

Photo Cerutti -2014

 

« Jo aimait lire, il se montrait hyper strict en français. Donc nous avons créé un prix littéraire qui porte son nom. Puis, nous nous sommes dits qu’il serait bien d’avoir un salon du livre de montagne. Mais où ? Le Kurhaus, sur les hauteurs d’Arolla, présentait tous les avantages et le propriétaire du moment nous a vraiment laissé son hôtel. Cela a été un succès littéraire, populaire. « La Rencontre Internationale du Livre de Montagne » était un moment convivial, chaleureux, pour les montagnards. Nombre de gens se baladaient et s’arrêtaient à l’Hôtel visiter les stands, les expositions ou suivre les conférences. Il y avait deux dames de 80 ans qui venaient toutes les années. Elles louaient à Montana et prenaient un chauffeur pour monter jusqu’à Arolla… »

Propos recueillis par Joël Cerutti

Sites d’Andrée Fauchère :

https://jardinsdelasante.ch/

https://www.a-fauchere.ch/

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