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Jouer avec la musicalité des mots et les noires situations, la partition réussit à Yves Gaudin. Après « Trop tard pour mourir » (2015), son « En vérité » (2020) entame l’année sur les chapeaux de roues critique. Il a bourlingué dans le monde entier, Yves. Il est revenu poser ses valises en Valais. Il te décrit ses lieux de prédilection.

 

Aux Arsenaux de Sion (La Médiathèque en langage pacifique), je flanque toujours à Yves une paix impériale. Il a l’écran de son Mac levé. J’ai l’écran de mon Mac levé. On bosse. Chacun avec nos mots. On ne trouble pas ces têtes à têtes par des salutations d’usage. Juste un petit signe de la main. Lorsque je pars, je m’approche enfin de sa table et j’entame ma rengaine « Cela serait bien que l’on fasse un truc pour mon site… » Et je puis je le félicite vigoureusement parce que son polar « En vérité » (Éditions Héloïse d’Ormesson) glane des critiques dithyrambiques bien en dehors de nos frontières valaisannes, suisses.

Je m’étais entiché de son container dans « Trop tard pour mourir » (Éditions Faim de Siècle) et, lors de conversations chez Béatrice et Stéphane Riand, j’avais observé croître le projet d’ « En vérité ».

Yves décline les singularités (docteur en psychopathologie clinique, musicothérapeute, musicien pro tout court). Il ne les étale jamais. Il pratique la modestie des évidences qui vont de soi. J’aime le succès des gens que j’aime. Pour appuyer le message ( tu DOIS lire « En vérité » ! COMMENT tu n’as pas ENCORE lu « En vérité » !? Passe un confinement INTELLIGENT, BON DIEU !), voici son « Valais Surprenant », ses lieux favoris, qui le nourrissent. Il a rédigé lui-même les lignes qui suivent. Ce qui me permet de me reposer dès mon point final. JC

La croix (lieu-dit) 

« Enfin, « lieu-dit », par moi. Aucune idée si ce lieu s’appelle vraiment ainsi. Cela se trouve en dessous du barrage du Rawyl, sur le domaine skiable des Rousses (Anzère), mais un peu caché. Au mayen, avec mes parents et grands-parents, c’est là que j’allais l’été, petit, quand j’étais triste ou songeur. C’est là encore que je me ressource toujours. C’est comme si j’avais transformé mon boudoir en jardin secret. Ça doit être ça, la résilience. »

Le barrage du Rawyl 

« Ici, on ne finit jamais de s’étonner. Il y a tout : Le lac, si calme mais qui a recouvert, en son temps, plusieurs mayens ; Le sol lunaire des Audannes juste en dessus ; Le restaurant, avec son odeur de javel et son succulent tartare au whisky. On m’a longtemps laissé croire que derrière cette chaîne de montagnes, c’était la fin du monde. Alors qu’en fait, ce n’est que le canton de Berne. »

L’ancienne Pouponnière 

« Autrement dit, l’ancien conservatoire de musique et de danse. Tant de souvenirs ici. Quand je passe devant, j’ai l’impression que soit M. Jean Daetwyler que M. Oscar Lagger me font une mélodie. Je les entends vraiment. Il y a bientôt dix mille ans de ça, quand je siégeais au Conseil général, j’étais le seul à voter pour que cet endroit reste là et non dans les cages à lapin sur le parking du Scex. Paraît que le provisoire n’est pas fait pour durer. »

La clinique St-Amé à Saint-Maurice 

« Juste parce que c’est là que je suis né. Et que maintenant, à ce qu’il paraît, c’est un home pour personnes âgées. C’est donc peut-être là que je vais mourir. Revenir au point de départ après une si belle vie et montrer que finalement on naît poussière et on retourne poussière. La joie de vivre et l’humilité me vont bien. »

Les pyramides d’Euseigne 

« Oui, c’est un peu attendu, les pyramides d’Euseigne. Mais franchement, ces trucs posés au sommet, quand même ! Comme je n’y vais pas souvent, chaque passage est synonyme d’émerveillement. Peut-être que, comme certains, si j’y passais dessous, avec ma voiture, tous les jours, je ne les regarderais même plus. Dommage de ne plus voir l’essentiel. Juste en dessous, coule une source d’eau chaude. C’est géant ! La nature est notre maîtresse à tous. »

Le Lac sous-terrain de Saint-Léonard 

« En fait, ce n’est pas le Lac vu par les touristes. Mais depuis une crevasse qui se trouve dans la montagne, juste en dessus. Parfois j’y vais. Je regarde en bas. Je crie mon nom et quelqu’un crie mon nom aussi. Alors, je crie le nom de personnes disparues. Et elles réapparaissent. La vie est cadeau. »

Yves Gaudin

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